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REVUE DE PSYCHIATRIE

Perte des repères et lien social en mutation

jeudi 4 décembre 2003.

L’occident considéré à partir de sa filiation grecque est une civilisation qui a posé comme principe « fondateur », celui du « dé-repérage ».
Selon le philosophe Jean-Luc Nancy, la naissance du politique dans la cité grecque est issue de cette mise à distance du théologique et de ses repères constitutifs, dans la perspective novatrice d’autodonation de ces repères. Le monothéisme, mais surtout le christianisme, accentue cette orientation en promouvant la « mort de Dieu » avant l’heure moderne ou nietszchéenne. L’époque contemporaine, où les signifiants d’exil, de désert, d’impossible (Lacan) font florès dans la culture, est celle du dé-repérage par rapport à la loi. Il n’y a pas de loi de la loi. La faillite de la figure du souverain comme celui qui y fait exception, comme garant, est devenue caduque. L’autre possibilité qui excède la loi est la foi, entendue comme fides, non savoir et confiance/assurance mise en l’Autre (à distinguer de la croyance, savoir faible et autarcique) et qui selon J.-L. Nancy maintient le lien social et l’empêche de se dissoudre dans les affres de la pulsion de mort (haine, meurtre, etc.). La perte de repères que l’on ne cesse d’évoquer et qui qualifie le rapport des enfants au monde qui les entoure, est solidaire de cette perte de confiance vis à vis des adultes, et témoigne d’une civilisation en profonde mutation, qui accuse une perte non d’objet mais de sujet. « Perte sèche », « constitutive de nous-mêmes » et des enfants à venir, conduisant à tenter de nous repérer « sur l’impossible, paradoxe constitutif de notre modernité ». Perte structurelle et non conjoncturelle de confiance, de foi, d’une civilisation qui désinstitue aussitôt ce qu’elle institue.

Frank Bellaïche

Nancy J-L. Elucidations 2003 ;8:24-6.



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